Boule truquée, farcie, fadée… quésaco ?

À l’heure où le fair‑play est revendiqué par tous, certains joueurs peu scrupuleux n’hésitent pas à utiliser des boules « truquées » pour s’assurer un avantage déloyal. Car, il faut bien le reconnaître, il existe des tricheurs partout et la pétanque a les siens, comme avec la boule trafiquée, dite « boule farcie ».

Que recouvre exactement cette pratique ? Comment la reconnaître, et que dit le règlement ? Débutants comme boulistes chevronnés, voici ce qu’il faut savoir.

Qu’est-ce qu’une boule truquée ?

Boule farcie ou remplie

Une boule de pétanque est creuse. Pour la « farcir », il suffit d’introduire à l’intérieur, par un trou minuscule, une petite quantité – environ 50 grammes – de mercure, d’huile lourde, de sable ou même de gaz. On rebouche le trou et on polit à nouveau la boule. L’avantage de la boule farcie est que, dès qu’elle a tendance à se stabiliser en un point, le poids mobile de l’intérieur joue et arrête complètement sa course.

Si le cochonnet est placé en haut d’une pente, la boule farcie s’arrête près de lui mais ne redescend pas. Sur un terrain caillouteux, elle semble écraser le petit caillou rencontré, alors qu’une boule normale sera déviée par lui. Sur une portée haute, la boule ne rebondit pas à l’atterrissage et s’arrête presque instantanément. Au tir au fer, elle n’aura quasiment aucun recul à l’impact, favorisant le carreau, et ramassera beaucoup plus si le tireur est un peu court.

On peut comparer son comportement à celui des boules lyonnaises (comme Unibloc et La Boule d’Or) qui sont plus grosses et plus lourdes que les boules de pétanque mais surtout remplies d’élastiques ou de pièces métalliques pour les rendre avantageuses.

Certaines boules de pétanque de loisir (non homologuées), souvent bon marché et fabriquées en Chine, sont également remplies de sable afin de les alourdir. Leurs coques en métal, particulièrement fines pour des raisons économiques, nécessitent ce remplissage pour compenser leur légèreté.

Boule fadée ou recuite

Il s’agit d’une boule ayant subi un traitement thermique appelé « recuite » après sa fabrication. Cette opération consiste à chauffer le métal à une température précise, puis à le laisser refroidir lentement. Ce processus permet d’assouplir la structure du métal, en réduisant sa dureté naturelle.

Le but est de modifier le comportement de la boule lors des chocs : elle absorbe mieux les impacts, rebondit moins, et « colle » davantage au sol. On parle alors de boule particulièrement tendre, très appréciée par certains tricheurs, tireurs ou pointeurs, recherchant une meilleure maîtrise.

Progressivement, au fil des concours et des chocs répétés, la surface de la boule se couvre de plats causés par les coups. Ce vieillissement prématuré, lié à la tendreté excessive du métal, accélère grandement son usure par rapport à une boule classique.

Comment détecter une boule truquée ?

Le tobogan (méthode abandonnée)

Il s’agit d’un gracieux appareil composé d’un rail tordu disposé en pente douce. Ce rail présente deux dépressions. La boule est fixée, au départ, en haut du rail grâce à une vis de serrage. En desserrant la vis, la boule libérée descend doucement, suivant la déclivité du rail. Si elle passe les deux dos d’ânes, la boule est bonne. Si, au contraire, elle s’arrête en route dans un creux, elle est farcie.

Le rail (méthode abandonnée)

Comme son nom l’indique, le rail est composé d’une bande d’acier disposé en pente et limitée par un heurtoir métallique. La boule lancée, même doucement, suit le rail et rebondit sur le heurtoir : si elle revient à son point de départ, c’est une boule licite. Si au contraire, elle reste sur le chemin du retour, elle est farcie.

Ces deux moyens de détection sont efficaces, certes, mais pas absolument rigoureux d’où leur abandon.

Aujourd’hui, la FFPJP dispose de 5 moyens de déceler les boules trafiquées :

  1. Les boules sont pesées avec une balance ménagère.
  2. Les boules sont contrôlées sur une assiette appelé Boulhonnête.
  3. La dureté des boules est vérifiée avec un appareil de mesure de dureté (boule recuite).
  4. Les boules peuvent être vérifiées dans un centre de radiologie (boule truquée au gaz).
  5. Ouverture des boules (ex : vérifier la présence de mercure).

L’assiette Boulhonnête

L’assiette de contrôle Boulhonnête est un plateau métallique concave sur lequel on fait rouler ou osciller la boule à tester. Elle permet de déceler la présence de corps étrangers à l’intérieur, invisibles à l’oreille ou aux vibrations.

On lâche la boule contre le rebord, on déclenche un chronomètre, puis on mesure le temps d’oscillation jusqu’à l’arrêt complet.

  • Boules lisses ou striées : elles ne doivent pas s’immobiliser avant 30 secondes (jusqu’à 50 s pour les boules usées).
  • Boules à motifs : le seuil est réduit à 18 secondes (entre 18 et 22 s si elles sont usées).

Si la boule s’immobilise avant ces seuils, deux contrôles supplémentaires sont effectués. On retient alors la moyenne des trois mesures pour valider ou non sa conformité.

Cette méthode est plus fiable et plus dissuasive. On la retrouve généralement sur le site de chaque manifestation.

Contrôle des boules : qui peut le faire ?

Le contrôle des boules peut être effectué par :

  • L’arbitre à la demande d’un joueur.
  • L’arbitre de sa propre initiative.
  • Le délégué d’un concours en présence de l’arbitre (obligatoire).
  • Un membre d’un jury de concours en présence de l’arbitre (obligatoire).

Les risques et sanctions

Le recours à une boule truquée expose à :

  • Disqualification immédiate et perte du match.
  • Suspension ou radiation par la FFPJP / FIPJP.
  • Atteinte à la réputation d’un joueur ou d’un club.

Par ailleurs, manipuler du mercure ou des gaz à l’intérieur d’une boule comporte des risques pour la santé et l’environnement.

Il est regrettable de constater que certains tristes personnages cherchent à tricher en « empochant » la victoire grâce à ces boules frauduleuses : peut‑on encore parler de victoire lorsque le succès repose sur la supercherie ? Non.

admin